Compétition : "Southland Tales" de Richard Kelly
Avec Southland Tales présenté en compétition, le jeune réalisateur américain Richard Kelly, remarqué en 2001 avec Donnie Darko, effectue son baptême cannois. Ce film d'anticipation évoque une ville de Los Angeles victime d'une attaque nucléaire en 2008, véritable catastrophe précipitant l'Amérique dans la guerre. Pour répondre à la pénurie de carburant, la compagnie US-IDent élabore un générateur d'énergie inépuisable, qui fonctionne sur les flux de l'Océan. Dans cette ville au bord du chaos, on suit les destins entrecroisés de Boxer Santaros, acteur de films d'action frappé d'amnésie, de Krysta Now, ex-star du X en pleine reconversion, et des frères jumeaux Roland et Ronald Taverner, dont le destin se confond avec celui de l'humanité toute entière.
"C'est une comédie sur la fin du monde, assure Richard Kelly. Southland Tales parle de là où va notre pays et de nos grands dilemmes actuels sur l'énergie alternative, le terrorisme, nos libertés civiles qui nous sont retirées une à une ou encore les effets potentiels de la dégradation de l'environnement sur le comportement humain, son impact neurologique et ses conséquences sur le réchauffement climatique."
Conférence de presse : "Southland Tales"
Le réalisateur Richard Kelly, les comédiens Sarah Michelle Gellar et Dwayne "The Rock" Johnson, ainsi que le producteur Sean McKittrick se sont réunis à l'occasion de la conférence de presse de Southland Tales. Morceaux choisis.
Richard Kelly sur sa vision de la situation politique aux Etats-Unis :
"Ce film est tout un ensemble d'idées qui sont toutes liées à une question très importante au sujet de la sécurité, des combustibles alternatifs et de l'obsession de la célébrité mélangée à la politique. On voit dans ce film une sorte de tableau de différents éléments imbriqués. En outre, les problèmes ne sont pas simples aux Etats-Unis. Je crois que le film doit être considéré comme un puzzle, on doit aborder l'ensemble de ces questions avec humour, comme dans une comédie – c'est un parti-pris qu'on avait décidé. Je crois qu'il faut voir plusieurs fois ce film pour véritablement saisir tous les éléments impliqués. Mais il n'y a pas de solutions simples aux dilemmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui, aux Etats-Unis et dans l'ensemble de la planète.(...) J'aime mon pays, je suis un patriote, et je pense que ce film doit être considéré comme un film patriotique."
Sur la découverte du scénario par les acteurs :
Sarah Michelle Gellar : "Il est rare que l'on vous présente quelque chose d'aussi complet. En général, les metteurs en scène vous donnent un script avec quelques idées, cela vous plaît ou non... Avec Richard Kelly, non seulement c'est complet, c'est aussi interactif. Il ne jette pas une simple idée visuelle ou recommande un livre à lire, il coopère. Souvent, les réalisateurs sont très protecteurs avec leurs écrits. Alors qu'ici, tout le monde pouvait participer, y mettre sa créativité et voir ce qu'il allait en sortir. C'était une expérience, une sorte d'apprentissage merveilleux pour chacun d'entre nous."
Dwayne "The Rock" Johnson : "Richard Kelly a demandé à me rencontrer avant que je ne lise le script. Il m'a présenté quelques oeuvres d'art qui étaient merveilleuses pour me donner une idée de ce à quoi devraient ressembler le film et les personnages. A un certain moment, après avoir lu le script, j'ai développé ma propre interprétation de Boxer Santaros et de Jericho Cane, son alter-ego, mais j'avais pleinement confiance en Richard Kelly en tant que réalisateur. J'avais des questions bien sûr, des choses que je n'avais pas bien comprises à la première lecture du script, mais je savais que j'obtiendrais des réponses au fil du temps."
Richard Kelly sur le ton du film : "Le script a été écrit il y a quatre ou cinq ans. Au fil des années, il est devenu de plus en plus politique. (...) Je me suis posé un certain nombre de questions, j'ai voulu que l'ensemble de ces thèmes soit étroitement lié à ce qu'il se passe aujourd'hui dans la société, à l'évolution de notre pays. Au final, on a essayé de construire une comédie sur la base de tout cela et d'utiliser l'humour pour aborder ces thèmes très sérieux."
Dwayne "The Rock" Johnson sur le réalisateur :
"Richard Kelly est un artiste ambitieux. Il écrit en ce sens, comme le confirment ce film et Donnie Darko. C'était un défi pour moi. J'étais intrigué et séduit par son énergie qui est contagieuse. Après avoir lu le scénario, jaugé le caractère osé et courageux du propos, j'étais attiré."
Dwayne "The Rock" Johnson sur le fait d'être à Cannes :
"C'est incroyable, c'est un rêve qui devient réalité pour moi. Nous nous rendons compte qu'il y a beaucoup d'acteurs très connus avec des carrières exceptionnelles, qui ne sont jamais venus à Cannes, dont les films n'ont jamais été sélectionnés. Je suis très reconnaissant d'être présent ici."
Richard Kelly sur l'utilisation de la musique :
"C'est de la pop culture avec un sens politique. Il est devenu très important pour moi de travailler de près avec les musiciens, dans la pré-production. On a commencé à tourner, ensuite la musique a été composée. C'est un film de confrontations : on y trouve de la vulgarité, de la violence, de la comédie noire. Je voulais que la musique de Moby par exemple renforce cette notion d'équilibre interne délicat à maintenir. J'ai Frank Black des Pixies. On a choisi également du jazz ancien, du Louis Armstrong aussi. On a effectué beaucoup de recherches pour dénicher les musiques qui correspondaient aux thèmes du film."
Richard Kelly sur les références cinématographiques :
"David Lynch a toujours été quelqu'un de très influent à mes yeux. C'est un des plus grands cinéastes du monde. Ils sont nombreux à m'avoir influencé et il fait partie de cette liste très longue. Quand on veut définir son style en tant que cinéaste, on essaie de le faire d'une manière personnelle pour ne pas avoir l'impression d'emprunter à d'autres oeuvres cinématographiques. L'influence la plus importante pour Southland Tales est un film intitulé Kiss me Deadly, condamné par une commission gouvernementale, jugé immoral en 1955 et dangereux pour la jeunesse américaine. C'est un de mes préférés. (...) Je me disais qu'on était en train de refaire ce film sur le plan spirituel."